Neige
La neige recouvrait doucement le sol de la propriété. Au deuxième étage du manoir, Sarah observait, par la fenêtre de sa chambre, le ballet incessant des flocons tombant du ciel. Elle savait qu'elle aurait dû s'en réjouir. Mais seule la tristesse pouvait se lire sur son visage. La tête appuyée contre un carreau, une larme s'échappa de son œil. Elle allait être seule pour Noël. Seule avec ses parents. Le monde était décidément bien cruel avec elle…
La jeune fille blonde s'était réjouie de revoir ses cousins et cousines. Chaque hiver, ils passaient les fêtes ensemble et c'était le moment le plus agréable de l'année pour Sarah. Elle pouvait enfin s'amuser, rire, tout simplement vivre… Mais là, avec cette neige qui tombait la veille de Noël, ses oncles et tantes avaient appelés pour dire qu'ils ne pourraient pas faire le déplacement, c'était trop dangereux.
Sarah repensa à sa cousine Rose qui avait 18 ans comme elle. L'an passé, elles s'étaient tellement amusées toutes les deux… La petite brune était pleine de vie et poussait la blonde à sortir de sa réserve habituelle. Ce n'était pas du goût de sa mère mais cela ne durait qu'une semaine. Et puis sa mère ne savait pas la moitié des choses qu'elle faisait avec Rose… Elles s'étaient embrassées… Sarah se souvenait de ce moment avec délice…
Comme elle le faisait souvent, la brune était venue la rejoindre dans son lit pendant la nuit pour s'échanger leurs secrets les plus intimes… Et puis Rose lui avait demandé si elle avait déjà embrassé quelqu'un, alors qu'elle savait pertinemment que cela ne lui était jamais arrivé… La blonde avait à peine répondu par la négative qu'elle avait sentit les lèvres de sa cousine se poser sur les siennes. La sensation était… bizarre… Elles étaient restées longtemps accolées l'une à l'autre et Sarah avait pris goût à sentir la langue de la brune se mélanger à la sienne… Le jour suivant, Rose était repartie et elles ne s'étaient pas revues depuis.
Sarah avait rêvé à de nombreuses reprises de leurs retrouvailles pendant toute l'année écoulée…
La blonde approcha ses lèvres de la vitre de sa fenêtre et y déposa un baiser en fermant les yeux. Elle essayait de retrouver la fraîcheur du baiser de la brune à travers la froideur de la vitre… Elle sursauta quand elle entendit la porte de sa chambre s'ouvrir. Détachant en vitesse ses lèvres du carreau, elle remarqua qu'elle y avait laissé une empreinte visible qu'elle se dépêcha d'effacer avec la manche de son pull. Elle entendit la voix de sa mère avant même qu'elle ait pu se retourner.
La mère de Sarah : Que faisais-tu ?
Sarah, les joues rouge : Rien… Je regardais par la fenêtre… la neige qui tombe…
La mère de Sarah : Tu as révisé ton cours d'histoire ?
Sarah : Mais… mais ce sont les vacances mère !
La mère de Sarah : Pour les autres peut-être mais pas forcément pour toi… Tu devrais profiter du mauvais temps pour avancer dans tes devoirs. Tu n'as rien de mieux à faire j'ai l'impression !
Sarah baissant la tête : Oui… oui mère…
La mère de Sarah : Et prépares ta tenue la plus chaude pour ce soir !
Sarah : On… on va pouvoir aller à la messe ce soir ?
La mère de Sarah : Nous irons à pied.
Sarah : D'accord…
La blonde regarda sa mère fermer la porte et souffla de dépit. Elle avait crû qu'au moins ils n'auraient pas à aller à la messe, mais là encore, elle s'était fait trop d'illusions… Certes, le manoir n'était situé qu'à un kilomètre du village mais avec la neige et la nuit, Sarah trouva que c'était dangereux de s'aventurer dans pareille entreprise… Mais, quand il était question de religion, sa mère était intransigeante…
*****
Sarah était plongée dans son livre d'histoire quand elle entendit le carillon de la porte retentir. Elle ressentit une vive excitation s'emparée d'elle et se précipita à sa fenêtre. Mais il n'y avait aucune voiture… Elle éprouva un petit désenchantement, elle avait cru l'espace d'un instant que Rose avait pu finalement venir…
Elle remarqua en revanche des traces de pas dans la neige. La personne qui avait sonné à la porte avait dû arriver à pied. Sarah se demanda qui cela pouvait bien être…
*****
Louise, la mère de Sarah, fut surprise quand elle vit la jeune fille que Raymond fit pénétrer dans le salon. Ses cheveux bruns lui descendant sur les épaules étaient parsemés de flocons blancs alors que, en dessous de son manteau, Louise vit que la magnifique robe noire qu'elle portait était couverte de neige dans sa partie inférieure. Elle était pieds nus.
Louise : Bonjour mademoiselle.
La jeune fille : Excusez-moi de vous déranger madame mais ma voiture est partie dans le fossé juste devant votre grille et, mon téléphone portable étant déchargé, je me suis permise de venir jusque chez vous afin de vous demander si je pouvais me servir de votre téléphone pour appeler une dépanneuse.
Louise apprécia instinctivement cette jeune femme qui "savait parler", contrairement à la plupart des jeunes de son âge qui ne respectait plus rien.
Louise : Vous avez très bien fait. J'espère que vous n'avez rien eu dans votre accident ?
La jeune fille : Merci mais non, j'ai eu de la chance…
Louise : Je vois que vous n'avez plus vos chaussures. Vous avez dû prendre froid !
La jeune fille : Quand je suis descendue de ma voiture, elles se sont enfoncées dans la neige et je n'ai pas pu les récupérés… J'ai préféré courir pour venir jusqu'ici…
Louise montrant le feu dans la cheminée : Approchez-vous pour vous réchauffer…
La jeune fille : Merci beaucoup madame…
Louise : Vous vous appelez comment mademoiselle ?
La jeune fille : Eliza. Eliza Lehane.
Eliza s'installa sur une chaise et présenta ses pieds devant le feu pour les réchauffer.
Louise se tournant vers le domestique : Raymond ! Allez voir Sarah et dites lui de descendre.
Raymond : Très bien madame.
Le domestique s'engagea vers l'escalier.
*****
En rentrant dans le salon, Sarah fut surprise de voir une jeune fille brune assise devant la cheminée, massant ses pieds nus tout en discutant avec sa mère.
Louise voyant Sarah rentrer : Ah Sarah, te voilà ! (désignant la jeune fille brune) Je te présente Eliza, elle a eu un accident juste devant notre allée et elle est venue se réfugier chez nous !
Sarah regardant Eliza : Bonjour.
Eliza : Bonjour mademoiselle. Je suis juste venue pour appeler une dépanneuse mais madame votre mère m'a très gentiment invité à me réchauffer.
Louise : Cela est tout à fait naturel. Il faut parfois s'aider les uns les autres. Eliza m'expliquait qu'elle allait rejoindre ses parents mais je crois que vu les conditions météos, il serait préférable qu'elle reste chez nous cette nuit. De toutes façons je ne crois pas qu'une dépanneuse puisse se déplacer par le temps qu'il fait.
Eliza : C'est vraiment très généreux de votre part madame mais je ne veux surtout pas vous déranger, vous et votre famille. Surtout pour la veillée de Noël.
Louise : Ne vous inquiétez pas, vous ne nous dérangerez pas le moins du monde. D'ailleurs nous attendions de la visite mais ils n'ont pas pu se déplacer à cause de la neige. Votre compagnie nous sera fort appréciable. Et Sarah se sentira un peu moins seule, je sais qu'elle doit être déçue que ses cousines n'aient pas pu venir. N'est-ce pas Sarah ?
Sarah fut surprise par la marque inhabituelle de bienveillance de sa mère.
Sarah : Oui, bien sûr mère.
Eliza : Dans ce cas, je ne peux que capituler. Je vous remercie beaucoup madame… (se tournant vers Sarah) et vous aussi mademoiselle.
Sarah acquiesça d'un sourire mais elle avait réalisé que cette Eliza ne remplacerait pas le moins du monde Rose. La jeune femme brune, aussi sympathique qu'elle pouvait apparaître, semblait terriblement guindée et sérieuse quand sa cousine se montrait facétieuse et joueuse. "Mais au moins je me sentirais un peu moins seule…"
Louise : Sarah, peux-tu prêter une de tes tenues à Eliza ? La sienne est trempée par la neige.
Sarah : Bien sûr, mère.
Eliza : Oh, ce n'est pas la peine, vraiment…
Louise : Vous êtes mon hôte alors me voilà responsable de vous. Je n'ai pas envie que vous preniez froid !
Eliza : Vraiment madame, je ne sais comment vous remercier.
Louise : Votre présence nous ait déjà fort appréciable.
Sarah se demandait d'où pouvait sortir cette jeune fille qui se confondait si bien avec le décor. "Elle semble être tout ce que mère voudrait que je sois…" Sa politesse, sa manière de parler, tout cela correspondait à ce que sa mère lui apprenait mais qu'elles ne rencontraient jamais ailleurs. Même ses cousines n'avaient pas une éducation aussi stricte que la sienne. "Je croyais être la seule… Peut-être que finalement cette fille me ressemble beaucoup et que l'on va pouvoir bien s'entendre… Sauf que elle, elle a l'air heureuse…"
Louise : Vous allez à la messe Eliza ?
Eliza : Oui, effectivement.
Louise : Peut-être voudrez-nous alors nous accompagner ce soir. Nous allons nous rendre au village à pied, il est seulement à un kilomètre.
Eliza : Cela sera avec plaisir.
Louise : Très bien. Sarah va vous accompagner dans sa chambre pour vous aider à trouver une tenue. Je pense que vous faîtes à peu près la même taille. Mais vous souhaitez peut-être avant tout appeler vos parents ?
Eliza : Oui, je veux bien, merci.
Louise : Sarah, tu vas lui montrer où se trouve le téléphone.
Sarah : Oui mère.
Les deux femmes quittèrent le salon et Sarah laissa Eliza tranquille pour téléphoner.
*****
Sarah referma la porte de la chambre derrière elles. Elle se retrouva un peu gênée d'être seule avec cette inconnue. La blonde, peu habituée aux contacts avec le monde "extérieur", ne savait pas trop quoi dire.
Sarah : Je… je vais vous montrer ma garde-robe…
Eliza : On peut peut-être se tutoyer, non ?
Sarah : Oui, bien sûr, cela ne me pose pas de problèmes.
Eliza : Ta mère est gentille.
Sarah ouvrant sa garde-robe : Oui… oui elle a l'habitude d'être généreuse avec les autres…
Eliza s'approchant : J'espère vraiment que je ne dérange pas.
Sarah faisant défiler ses vêtements : Oh non, pas du tout ! Au contraire, tu vois, ça me fait un peu de compagnie.
Eliza : Tu es fille unique ?
Sarah : Oui…
Eliza : Etudiante en vacances ?
Sarah : Oui… enfin non… Je… je ne suis pas étudiante… En fait… je prépare mon bac… Je ne vais pas à l'école… J'y suis jamais allé… c'est ma mère qui me donne des cours… alors je reste tout le temps ici…
Eliza : Je croyais que l'école était obligatoire, non ?
Sarah : Non, ce n'est pas l'école qui est obligatoire, c'est l'instruction…
Eliza : Ah d'accord ! Et tu te sens pas trop seule ?
Sarah devenant rouge : Si… Enfin… un peu oui…
Eliza : Et tu vas faire quoi une fois que tu auras ton bac ?
Sarah : Je… je vais me marier…
Eliza : Tu as besoin d'avoir ton bac pour te marier ?
Sarah : Non, bien sûr que non… mais ma mère veut que je sois bien éduquée pour que je puisse ensuite enseigner à mes enfants…
Eliza : Et tu as trouvé l'heureux élu ?
Sarah : Non… Pas encore… Ma mère continue de chercher…
Et cette recherche faisait parfois trembler Sarah… Elle avait peur de la personne que finirait par choisir sa mère… Celle-ci ne s'était-elle pas mariée avec un homme de 30 ans son aîné ? Sarah, qui rêvait pourtant souvent d'amour, en venait donc à redouter de se marier… Mais cela, elle ne pouvait pas le dire à Eliza…
Elle osa alors interroger la jeune femme brune.
Sarah : Et… et toi ? Tu fais quoi ?
Eliza : Je suis en 1ère année de Fac de Médecine.
Sarah : Ah… ok… (montrant une robe noire) Celle-ci te plaît peut-être ?
Eliza souriant : Oui… Je vois que tu as tout de suite cerné mes goûts !
Sarah : Je suis très observatrice !
Eliza riant : Je vois ça…
Sarah sentit un réconfort de voir la brune rire. Elle n'était finalement pas aussi froide qu'elle avait pu le croire au préalable. C'était une jeune fille bien élevée et très gentille.
Eliza essayant de descendre la fermeture éclair de sa robe dans son dos : Tu m'aides ?
Sarah approchant : Oui… Bien sûr…
La blonde avait l'habitude de faire ce genre de choses avec Rose mais elle n'en fût pas moins gênée quand elle fit tomber la robe de la brune à ses pieds. Celle-ci se trouvait désormais avec ses seuls sous-vêtements. Sarah essaya de détourner le regard des courbes de son corps.
Eliza passant sa main sur sa peau : Je suis froide… non ?
Eliza prit alors la main de Sarah et la dirigea vers son ventre. Le contact de la peau de la brune l'électrisa littéralement. Elle ressentit une bouffée de chaleur monter en elle mais elle devait admettre que la peau de la brune était froide…
Eliza insistant : Non, tu ne trouves pas ?
Sarah bredouillant : Oui… effectivement…
Eliza souriant en coin : Et tu ne voudrais pas me réchauffer alors ?
Sarah sentit son cœur prêt à exploser suite à cette déclaration. La réchauffer ? La brune remonta alors légèrement la main de la blonde pour la poser délicatement sur son soutien-gorge. Elle n'osa pas faire le moindre geste si bien que sa main resta contre la poitrine d'Eliza…
Eliza la voix douce : Tu veux l'enlever ?
Sarah se demandait si la brune lui demandait si elle souhaitait enlever sa main ou si elle souhaitait lui retirer son soutien-gorge ? De toutes façons, dans les deux cas, elle ne savait pas quoi répondre…
Et puis, entendant des pas approcher dans le couloir, elle retira vivement sa main. Prenant dans sa main la robe qu'Eliza devait enfiler, elle vit la porte de la chambre s'ouvrir et sa mère apparaître dans l'encadrement.
Louise : Alors, vous avez trouvez ? (voyant Eliza en sous-vêtements) Dépêche-toi Sarah, elle va prendre froid !
Sarah, les joues écarlates : Oui mère, désolée…
La mère de Sarah s'approcha prestement et arracha la robe des mains de sa fille. Elle l'enfila elle-même sur le corps dénudé de la brune. Sarah fut à la fois soulagée de voir ce corps tentateur recouvert et déçue de n'avoir pu le toucher une nouvelle fois… Mais elle chassa bien vite cette dernière pensée de son esprit. C'était mal…
Elle regarda sa mère et Eliza sortir de la chambre. Elle vit parfaitement le clin d'œil que cette dernière lui adressa. Elle s'engagea à leur suite, ses mains tremblant légèrement.