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Télévision et homosexualité: et la France, alors ?

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kohane

kohane
Animatrice A.O.C.
Animatrice A.O.C.

Après L'homosexualité féminine dans les séries américaine, L'homosexualité masculine dans les séries américaines (que je n'ai pas posté), le blog libé "des séries et des hommes" continue avec "Télévision et homosexualité: et la France, alors ?" (qui est quand même très centré sur l'homosexualité masculine)

Télévision et homosexualité: et la France, alors ?

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C'est en 1992 que l'homosexualité commence à gagner un peu de visibilité sur les écrans français, et ça se passe contre toute attente sur TF1, dans la série Une Famille Formidable (qui entamera cette année sa neuvième saison). Si la même année le personnage de Charles Maranne dans le soap français Beaumanoir, diffusé sur Antenne 2, ne marquera pas les esprits, il n'en ira pas tout à fait de même avec celui de Nicolas (David Sarfati), le fils aîné de la famille Beaumont. Après avoir été marié, puis alcoolique, drogué et addict au jeu dans la troisième saison, le fiston semble découvrir subitement son homosexualité, qu'il annoncera à ses parents entre le fromage et le dessert, lesquels réagiront extrêmement bien en accueillant à bras ouverts son compagnon Patrick. Mais les choses se gâtent, et Patrick trompe Nicolas qui se réfugie dans les bras de Lucas (vous suivez?), qui a lui-même deux enfants d'un précédent mariage. Et soudain, c'est le drame: l'ex-femme de Lucas découvre qu'un de leurs fils est homosexuel. Dévastée à l'idée que son fils suive l'exemple de son père, elle l'en informe aussitôt et l'accuse d'être responsable de l'homosexualité de son fils (attention, c'est du lourd). Lucas, le mari et père, est lui-même ravagé par la nouvelle, et ne peut se résoudre à l'idée que son fils souffre autant que lui-même a souffert de son homosexualité. Il envisage donc de quitter Nicolas Beaumont pour retourner vivre avec son ex-femme (vous voyez la logique) le temps que son fils revienne à la raison.



Et tout est bien qui finit bien au pays de TF1, puisque le fils de Lucas se dégotte une jolie petite amie, apaisant la crise parentale et permettant à son père de poursuivre son histoire d'amour avec Nicolas. Outre que le fils de Lucas sera probablement bon pour une psychanalyse de 20 ans, le scénario démontre qu'on est encore très loin d'un traitement intelligent – ou ne serait-ce que respectueux – de l'homosexualité par la télévision française.

Ce n'est pas AB Productions qui nous prouvera le contraire, puisque fin 93 débarque la sitcom navrante Les Filles d'à côté, avec le personnage tout aussi navrant de Gérard, employé dans une salle de gym et trimballant à lui seul plus de clichés sur les homosexuels qu'il n'est permis d'en ressasser pendant toute une vie. Gérard, de son vrai nom Marcel —qu'il a changé car il trouvait que Marcel sonnait trop viril—, est bodybuildé, huilé, épilé, extrêmement efféminé et dépourvu de toute vie sexuelle, cantonné dans le rôle du gentil voisin serviable et à l'écoute des filles. D'à côté, donc. Vous admirerez dans cet extrait l'hypocrisie des scénaristes («heureusement que je ne suis pas une fille, sinon ce garçon, je lui sauterais dessus!») :



Mais si tout le monde se souvient de Gérard, je dois à un article de Sullivan Le Postec cette incroyable (et affligeante) découverte: l'épisode 73 des Nouvelles Filles d'à côté (1995), sobrement intitulé « Le Trou de Balle » (vous pouvez vérifier) raconte la terrible découverte de Gérard: un impact de balle, dans sa salle de bains. Tout est dit dès les cinq premières minutes, au cours desquelles Gérard, affolé, raconte sa mésaventure en ces termes, le tout ponctué des rires hystériques du public: «J'ai trouvé un trou de balle dans ma salle de bains. Alors je me suis approché pour être sûr de ce que c'était. (…) Je ne suis pas un spécialiste, vous comprenez!» La scène, navrante de stupidité et de vulgarité, suffit à elle seule à illustrer tout le mépris dans laquelle la télévision française et le public (du moins une partie) tiennent l'homosexualité en 1995.

A partir de l'automne 99, la loi sur le PACS et sa très forte médiatisation vont jouer un rôle non négligeable dans la visibilité de l'homosexualité sur les écrans français. D'après l'article de Brigitte Rollet, Les homosexuels dans les séries françaises (Médiamorphoses, Hors-Séries n°3, 2007), les fictions télévisées diffusées entre 1995 et 2005 ont intégré davantage de personnages homosexuels que durant toutes les décennies précédentes. Brigitte Rollet évoque également un élément intéressant dans son article. Elle constate que l'homosexualité est toujours traitée comme un «douloureux problème», pour reprendre la fameuse expression de Ménie Grégoire, de son vrai nom Marie Laurentin, journaliste et écrivain française.

Pour mieux comprendre les enjeux, un petit rappel historique s'impose: Ménie Grégoire est surtout connue pour sa carrière en tant qu'animatrice de radio sur RTL de 1967 à 1982, et pour avoir été à l'origine (bien malgré elle) de ce qui est désormais généralement considéré comme l'un des actes fondateurs du militantisme homosexuel français. Le 10 mars 1971, l'émission de Ménie Grégoire intitulée «L'homosexualité, ce douloureux problème» est enregistrée en direct de la salle Pleyel à Paris. Assistée d'un prêtre et d'un psychanalyste, la journaliste tente de démontrer que l'homosexualité ne peut être vécue autrement que comme une souffrance, et qu'elle doit être, pour parler clairement, soignée le plus tôt possible. «Il apparaît très relativement facile et très rapide d'enrayer une homosexualité commençante, c'est-à-dire rendre l'individu normal», déclare de but en blanc le psychanalyste présent. Mais l'assemblée ne l'entend pas de cette oreille, et une trentaine de militants du FHAR (Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire) débarque sur le plateau, forçant RTL à reprendre précipitamment l'antenne. La transcription de cette émission est disponible ici, et mérite le détour...

C'est donc bien cette conception de l'homosexualité, nécessairement vécue comme une souffrance à laquelle il faut mettre un terme, qui fut longtemps véhiculée dans les séries françaises. Si dans Une Famille Formidable, tout s'arrange lorsque le fils de Lucas se découvre finalement hétéro et rencontre une jeune fille, l'issue est différente dans La Vie devant Nous (TF1, 2002), puisque le jeune Gaël finira par se suicider après avoir tenté de «renoncer» à son homosexualité. Gérard, le prof de gym des Filles d'à côté, finira par épouser une femme, tandis que dans la plupart des séries policières (on peut notamment citer Femmes de Loi ou La Crim), les personnages d'homosexuels sont généralement soit victimes, soit coupables, et la plupart du temps mêlés à des affaires sordides. En somme, la logique est toujours la même: l'homosexualité est systématiquement présentée comme une souffrance, à laquelle les personnages succombent ou tentent de remédier par tous les moyens.

Il faudra attendre les séries Avocats et Associés et Crimes en Série pour voir enfin à la télévision française deux protagonistes gays qui ne sont ni victimes ni coupables, et ne finissent pas dans les bras d'une femme: toutes deux diffusées à partir de 1998, elles mettent en scène les personnages de Laurent Zelder (Avocats et Associés) et de Pierre Denard (Crimes en Séries) qui, et c'est une petite révolution à l'époque, ne vivent pas (ou du moins ne vivent plus) leur homosexualité comme une souffrance. Laurent est en couple, et sa relation avec Paul est traitée de la même manière que les autres couples hétérosexuels de la série. Ce qui en soi ne serait pas forcément un problème, si on ne constatait pas par ailleurs une certaine tendance, dans les séries françaises (mais pas seulement) à lisser et polir à l'extrême les relations homosexuelles d'un personnage. Si la télévision française est passée de la figure d'un Gérard, caricaturale à l'extrême, à celle d'un Laurent Zelder en quelques années, une constante demeure: le personnage homosexuel se doit d'être en couple, installé dans une tranquille relation monogame. La question n'est pas de savoir si le couple est un modèle «hétérocentré», mais de constater que, s'il est tout naturel que l'on nous décrive à longueur de saison les multiples relations amoureuses des personnages hétérosexuels, celles des personnages homosexuels sont quasi invariablement cachées voire inexistantes. Un extrait très parlant d'Avocats et Associés, avec Gérard Miller dans le rôle de Gérard Miller :



Impossible enfin de ne pas citer celle qu'il suffit de mentionner pour faire sourire tout le monde d'un air entendu: Plus Belle La Vie, qui rassemble tous les soirs plus de 6 millions de téléspectateurs, et squatte l'antenne depuis presque sept ans en martelant le même message, celui du «vivre-ensemble». On pourra reprocher tout un tas de choses à Plus Belle La Vie, notamment son ton très politiquement correct et le jeu parfois approximatif de ses acteurs, mais force est de constater qu'elle est une des seules séries françaises à diffuser à une heure de grande écoute les baisers amoureux de Thomas et de son compagnon. N'en déplaise à une certaine frange de l'audimat, qui ne l'entend pas de cette oreille et compte bien le faire savoir (il suffit d'aller faire un tour sur les forums de France 3 pour s'en convaincre). Clara Sheller (2005) et le triangle amoureux formé avec les deux hommes de sa vie, JP et Gilles, a également contribué, non seulement à une plus grande visibilité de l'homosexualité à la télévision française mais également à une certaine intelligence de traitement.



Si les personnages homosexuels sont en constante augmentation dans les séries françaises, reste maintenant à poursuivre le chemin et à laisser place à l'expression d'un vrai droit à la différence, qui ne soit pas forcément aligné sur le modèle des personnages hétérosexuels. Et la France aurait probablement tout à gagner à trouver sa propre voie, hors des sentiers parfois trop battus des séries américaines.

Photo cc See-ming Lee sur FlickR

source ici

Almeria

Almeria

Très bon article qui résume bien l'outrage et le tors que nous fait les média quand ils font dans le lourd, notons tout de même les bonnes séries qui "en parle"ou téléfilm sans faire forcément dans l'extra lourd.

Néanmoins, je me permet de revenir sur un truc si effectivement être homosexuel n'est pas se condamner a être malheureux tout ça, faut tout de même pas oublier que le monde n'est pas gay friendly, c'est pas l'homosexualité qui est un problème mais l'homophobie et également découvrir qu'on a pas la sexualité lambda de madame ou monsieur tout le monde n'est pas forcément vécu sourire aux dents et ultrabright, la socièté n'est pas spécialement sympathique avec les personnes sortant des sentiers battus même si ils sont très connus ces bons vieux sentiers...

Donc se battre pour que l'image qui est fait de "nous" dans les médias est bon gouts de pas taper dans les clichés de la folasse ou de la camioneuse ok, mais les eclipsés parce qu'ils sont pas assez "glam" ou ne font pas assez "hétéro quand même " faut voir a pas faire la mauvaise affaire a vouloir être considéré comme ...a ne pas devenir comme, des "choupinette le doigt en l'air qui s'habille en rose ça existe comme les filles au cheveux court très garçons manqué" tout existe comme il existe aussi des hétéros qui ont l'air très gay et qui ne le sont pas.
Refusons l'image lisse planqué entre ikéa et celio, qu'on veut nous coller a tous qu'on soi hétéro, bi , homo ou indéfinis..

Je touve les britaniques plus décoincés sur le sujet, ou tout les styles et tout les genres ont le droit d'avoir leur minute de gloire, si excès il y a c'est très assumé (métrosexuality - QF britanique), on adhère ou pas mais je trouve ça bien moins guindé et même les personnages les plus extrêmes sont pas dénués d'intelligence ou d'humour ce qui relative le coté "clichesque" que parfois peuvent revêtis certain protagonistes, peut être parce qu'il y a aussi le point de vu que tout ce qui est média est un cliché et que seul le documentaire peut être au plus proche de ce qu'est un homosexuel ou des images des homo, le reste relève souvent du fantasme et le martyre de St Sébastien rassure ceux qui doutent au final de leur propre hétérosexualité a encore de bons jours devant lui, mais ne jetons pas trop vite "le gerard" a la poubelle, laissons les vivres.

kohane

kohane
Animatrice A.O.C.
Animatrice A.O.C.

Pour mieux comprendre les enjeux, un petit rappel historique s'impose: Ménie Grégoire est surtout connue pour sa carrière en tant qu'animatrice de radio sur RTL de 1967 à 1982, et pour avoir été à l'origine (bien malgré elle) de ce qui est désormais généralement considéré comme l'un des actes fondateurs du militantisme homosexuel français. Le 10 mars 1971, l'émission de Ménie Grégoire intitulée «L'homosexualité, ce douloureux problème» est enregistrée en direct de la salle Pleyel à Paris. Assistée d'un prêtre et d'un psychanalyste, la journaliste tente de démontrer que l'homosexualité ne peut être vécue autrement que comme une souffrance, et qu'elle doit être, pour parler clairement, soignée le plus tôt possible. «Il apparaît très relativement facile et très rapide d'enrayer une homosexualité commençante, c'est-à-dire rendre l'individu normal», déclare de but en blanc le psychanalyste présent. Mais l'assemblée ne l'entend pas de cette oreille, et une trentaine de militants du FHAR (Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire) débarque sur le plateau, forçant RTL à reprendre précipitamment l'antenne. La transcription de cette émission est disponible ici, et mérite le détour...

j'ai omis de mettre de lien, donc le voici (très franchement c'est à lire!)

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